samedi 28 janvier 2012

Piano mal, instinct bien


Julien Sagot lance son premier album solo - Piano mal, instinct bien

Julien Sagot, c'est le percussionniste du groupe Karkwa. Vous l'avez peut-être déjà vu debout à la gauche de Louis-Jean Cormier, à frapper des cymbales, à grattouiller plein d'objets, à frapper des instruments qui n'ont pas de nom, pour enrober le rock de Karkwa. Profitant de la pause prolongée de son groupe, le Français d'origine lance un premier disque, Piano mal, qui se révèle plein d'audace et qui carbure à l'instinct.

Ce n'est pas la première fois qu'on entend Julien Sagot sur disque. Avec Karkwa, il a chanté et composé quelques textes, dont Pili-Pili et Au-dessus de la tête de Lilijune. C'est aussi à lui que l'on doit la pièce-titre de l'album Les chemins de verre ainsi que les mots de la chanson Red Light, interprétée par Brigitte Fontaine. 

Sur ce premier disque solo où il ajoute à sa tâche le piano et la guitare, on retrouve sa plume parfois abstraite, enrobée d'une musique variée, non linéaire, pavée d'univers clairs-obscurs. C'est beaucoup parce que Sagot travaille davantage avec le coeur qu'avec la tête. «Je suis autodidacte en musique. Quand j'ai commencé les percussions, j'allais sur le mont Royal le dimanche. Je me retrouvais complètement dans ces musiques-là, il n'y avait pas de barrières, de manières précises pour faire les choses. Et encore aujourd'hui, je trouve que c'est la meilleure école, de garder tout le temps les yeux ouverts, d'essayer, d'explorer, de se lancer dans des avenues complètement pétées. Comme ça, on ne peut pas vraiment se compter de mensonges. C'est proche de nos émotions brutes.»

Piano mal n'est toutefois pas un fouillis, mais un disque audacieux, qui se situe quelque part au croisement de Dominique A, de L'imprudence de Bashung et de l'univers de Karkwa. «J'ai eu un souci de garder le disque accessible. J'ai trouvé que Piano mal était mon meilleur compromis entre un côté pop et un côté "free", aérien, raconte Julien Sagot. Maintenant, être plus pop que ça, je ne pense pas que je pourrais... mais plus "free", ça oui par contre!»

Sans cadre rigide

Cette part laissée à l'intuition et au hasard fait partie de la méthode de création du musicien. Une note accrochée en plaquant un accord de piano qui ouvre une voie mélodique inopinée. Ou alors deux mots plus ou moins logiques qui se côtoient pour former une image. «Quand tu respires à la paille / fakir à tête de soleil / tes pieds de cuir me réveillent / de la braise entre mes dents», chante-t-il sur la pièce éponyme. 

«L'écriture automatique, c'est d'avoir confiance en son instinct, d'y aller à tâtons, d'être un aveugle. De se laisser aller. J'aime beaucoup Boris Vian, André Breton, par exemple. Parce que justement il n'y a pas de filet, juste des émotions, des idées, complètement tordues. Et ça me sort d'un cadre rigide, ça me fait voyager, ça me fait du bien.»

Julien Sagot a enregistré son album à Montréal mais aussi au studio La Frette, en région parisienne, avec l'aide de deux amis musiciens, Simon Angell (Patrick Watson, Thus:owls) et Leif Vollebekk. «Avec eux, ç'a été simple, on s'entendait dans la démarche, dans les textures recherchées. Ce sont des gens qui ont beaucoup de goût. Ils ont aussi permis d'ouvrir un peu les chansons, de faire respirer les parties instrumentales, de complémenter les chansons.»

Le percussionniste montera sur scène quelques fois au mois de février, dont lors de son lancement ouvert au public, le 1er février au La Tulipe, à Montréal. Sagot fera aussi la première partie des Barr Brothers à Québec le 17, à Montréal le 22 et à Sherbrooke le 25 février. Pour le reste, on imagine qu'il suivra... son instinct.

Article de Philippe Papineau paru le 27 janvier 2012 dans Le Devoir

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire